Ecrit après coup : Prendre
n'importe quelle œuvre d'art du musée d'art moderne de Luxembourg et en faire le héros d'une histoire.
C'est une histoire à dormir debout, je
vous assure. Certes moi je dors toujours debout mais cette histoire
ne s'adresse pas à ceux de mon espèce, pour peu qu'ils savent
lire.
Je vivais tranquillement mon existence de lave-linge dans cette maison sans histoire. Ce n'était pas l'extase, ils étaient toujours là pour me tailler un short ou me passer un savon mais je travaillais sans rechigner, bien que je faisais beaucoup de bruit à la tâche. Rien ne semblait devoir changer.
Pourtant, il y a une semaine, j'ai entendu mes propriétaires parler de ces toilettes qui étaient exposées dans un musée. Mon eau de javel n'a fait qu'un tour. Comment le plus laid des lieux de cette bicoque pouvait se retrouver exposé telle une œuvre d'art ? C'en était trop. Moi aussi je méritais d'être connu, d'être photographié. Pourquoi me rejetterait-on dans l'ombre, c'est parce que je suis blanc ?
Quoiqu'il en soit, je me suis concerté avec mon frère lave-vaisselle et mon voisin micro-ondes, qui partageaient mon avis. Je n'ai pas prévenu mon cousin sèche-linge, apparemment l'obscurité de la cave lui convient. Allez savoir, on a tous un attardé dans la famille. Nous avons patiemment attendu que les propriétaires partent en week-end pour que nous commencions notre épopée.
Je vivais tranquillement mon existence de lave-linge dans cette maison sans histoire. Ce n'était pas l'extase, ils étaient toujours là pour me tailler un short ou me passer un savon mais je travaillais sans rechigner, bien que je faisais beaucoup de bruit à la tâche. Rien ne semblait devoir changer.
Pourtant, il y a une semaine, j'ai entendu mes propriétaires parler de ces toilettes qui étaient exposées dans un musée. Mon eau de javel n'a fait qu'un tour. Comment le plus laid des lieux de cette bicoque pouvait se retrouver exposé telle une œuvre d'art ? C'en était trop. Moi aussi je méritais d'être connu, d'être photographié. Pourquoi me rejetterait-on dans l'ombre, c'est parce que je suis blanc ?
Quoiqu'il en soit, je me suis concerté avec mon frère lave-vaisselle et mon voisin micro-ondes, qui partageaient mon avis. Je n'ai pas prévenu mon cousin sèche-linge, apparemment l'obscurité de la cave lui convient. Allez savoir, on a tous un attardé dans la famille. Nous avons patiemment attendu que les propriétaires partent en week-end pour que nous commencions notre épopée.
A partir de là, il s'agissait surtout
de ne pas se faire remarquer. Le mieux était de sortir de nuit, où
les quelques passants en général sont dans un état qui les permet
de considérer comme normal que des machines puissent se déplacer.
En même temps les humains ont été assez fous pour gober cette
histoire de jouets animés dont ils ont fait deux suites. Ah ça, les jouets
c'est mignon, mais nous qui leur mâchons le travail, on est tout de
suite plus banals !
Après, tant que nous étions sur le trottoir, nous pouvions passer pour des retraités que l'on devait emmener vers leur dernière demeure. En voyant notre état encore bon, ces gens penseraient-ils peut-être à nous exposer. Mais non, il a fallu que l'on suive ces grille-pain qui se sont suicidés (puisqu'ils se sont grillés eux-mêmes), ces chaises en cuir qui nous narguent avec leur dossier aussi usés qu'un jean dans ma machine, et d'autres..
Après, tant que nous étions sur le trottoir, nous pouvions passer pour des retraités que l'on devait emmener vers leur dernière demeure. En voyant notre état encore bon, ces gens penseraient-ils peut-être à nous exposer. Mais non, il a fallu que l'on suive ces grille-pain qui se sont suicidés (puisqu'ils se sont grillés eux-mêmes), ces chaises en cuir qui nous narguent avec leur dossier aussi usés qu'un jean dans ma machine, et d'autres..
Nous voici maintenant jetés sans
vergogne à la décharge. Deuxième tentative d'apparaître
séduisants pour faire un défilé immobile. Il fallait que l'on nous
repère vite sinon quoi le temps dans les deux sens du terme pouvait
mettre à mal notre mission. Heureusement, un enfant qui accompagnait
sa mère lui demanda pourquoi nous étions ici alors que nous
n'étions pas écrasés, brûlés, fêlés... enfin hors service en
gros. Elle se renseigna auprès d'un des gardiens (ce n'est pas comme
ça qu'il est nommé ici mais pour nous c'est un gardien) si j'étais
encore en marche, ce dernier répondant que si j'étais sur un
trottoir, c'est qu'il y avait une raison. La dame lui proposa de
m'essayer chez elle, et si j'étais en état de marche (évidemment
pouffiasse, ai-je eu envie de répondre si je parlais l'Humain), de me ramener définitivement.
Ce qu'elle fit, avec mes deux compères. Retour à la case départ ? Non, pire : la femme voulait nous utiliser pour remplacer les anciens, là où le mari argua qu'ils étaient encore en marche et que nous devrions servir de pièce de rechange. Quel culot ! J'espère qu'il ne fait pas pareil avec les filles, à garder un modèle en réserve quand il trouvera le premier trop usé... Mais qui suis-je pour discuter de la logique des hommes : ils exposent de fichues et dégueulasses toilettes dans un musée !
Désormais, il fallait attendre. Encore. On avait appris à le faire. L'idée que nous puissions être abandonnés me faisait mal aux tambours. Soit l'un des appareils devait lâcher, soit l'un des deux devait avoir eu vent de ces fichus "water-closet" qui ont une bonne place. A moins que ce soit l'enfant qui en parle, après tout la vérité sort de leur bouche...
C'est ce qu'il s'est passé. Alors que les deux parents avaient repris leur discussion sur le besoin ou non de nous garder ici, leur garçon leur parla de ces toilettes et leur proposa de faire de même avec nous ! Nous mouillons rien qu'à cette idée moi et mon frère, le micro-ondes s'illumina de l'intérieur. Enfin nous allions pouvoir connaître cet honneur.
Ce qu'elle fit, avec mes deux compères. Retour à la case départ ? Non, pire : la femme voulait nous utiliser pour remplacer les anciens, là où le mari argua qu'ils étaient encore en marche et que nous devrions servir de pièce de rechange. Quel culot ! J'espère qu'il ne fait pas pareil avec les filles, à garder un modèle en réserve quand il trouvera le premier trop usé... Mais qui suis-je pour discuter de la logique des hommes : ils exposent de fichues et dégueulasses toilettes dans un musée !
Désormais, il fallait attendre. Encore. On avait appris à le faire. L'idée que nous puissions être abandonnés me faisait mal aux tambours. Soit l'un des appareils devait lâcher, soit l'un des deux devait avoir eu vent de ces fichus "water-closet" qui ont une bonne place. A moins que ce soit l'enfant qui en parle, après tout la vérité sort de leur bouche...
C'est ce qu'il s'est passé. Alors que les deux parents avaient repris leur discussion sur le besoin ou non de nous garder ici, leur garçon leur parla de ces toilettes et leur proposa de faire de même avec nous ! Nous mouillons rien qu'à cette idée moi et mon frère, le micro-ondes s'illumina de l'intérieur. Enfin nous allions pouvoir connaître cet honneur.
Les parents acquiescèrent.
Ils se mirent à contacter tous les musées qui avaient cette lubie
d'afficher tout et n'importe quoi dans leurs quatre murs. Certains
leur rirent au nez, d'autres n'étaient pas intéressés. Ils avaient
sans doute d'autres œuvres d'art plus appropriées, genre une
poubelle, un radio-réveil ou un godemiché. Non, vous ne voulez pas
savoir à quoi ça sert pour ceux qui se demandent...
Un établissement leur répondit favorablement. Du moins c'est ce que nous avions compris. Car si nous furent bien embarqués jusque dans ce musée, nous n'étions pas exposés. Apparemment nous étions sur liste d'attente, faute de place ! Mais bien sûr ! C'est pas grave, nous savons tout laver, les affronts compris. Au moins nous étions pris en charge pour que nous soyons prêts le moment venu.
Un établissement leur répondit favorablement. Du moins c'est ce que nous avions compris. Car si nous furent bien embarqués jusque dans ce musée, nous n'étions pas exposés. Apparemment nous étions sur liste d'attente, faute de place ! Mais bien sûr ! C'est pas grave, nous savons tout laver, les affronts compris. Au moins nous étions pris en charge pour que nous soyons prêts le moment venu.
Ce jour arriva
enfin. Bien que cela signifia qu'il fallait me séparer de mes deux
compères. Je devais en faire le deuil. Je leur fis au-revoir avec ma
porte mais je le fis si fort qu'ils se prirent un vent. Désormais
une nouvelle vie m'attendait. Je passais devant ces toilettes,
heureusement avec la cuvette baissée, elles n'allaient pas se mettre
à nu non plus. Je trouvai finalement ma place sur une bonne pierre
bien lisse, cela pouvait me servir de trône, sans allusion aux WC
bien entendu. Une autre fut posée sur ma tête, il est vrai que
j'avais souvent froid à cet endroit, personne ne voulait profiter de
mes bonnes vibrations dans mon ancienne demeure.
On y ajouta des ustensiles que je ne pus identifier, la pierre était trop lourde pour que je puisse vérifier. A ma gauche, on posa du linge usagé avec des pelotes de fils, comme s'il y avait besoin d'illustrer pourquoi j'ai été crée. Pourquoi pas, heureusement qu'on n'a pas fait pareil avec les toilettes... Mais je n'avais plus à les jalouser, j'étais enfin devenu une œuvre d'art à mon tour, l'un des plus beaux lave-linge qui soit !
Je ne me rappelle plus trop de la suite de l'histoire, ma mémoire me fait défaut depuis que je suis exposé. Ce que je sais, c'est que j'étais installé dans ce pays à peine plus grand qu'un slip d'obèse nommé Luxembourg et son musée exposait de l'art moderne. J'ai souvent été la proie des photographes curieux de voir un appareil ménager ici, mais certains ne savent même pas se servir de mon espèce, si cela peut les éduquer...
On y ajouta des ustensiles que je ne pus identifier, la pierre était trop lourde pour que je puisse vérifier. A ma gauche, on posa du linge usagé avec des pelotes de fils, comme s'il y avait besoin d'illustrer pourquoi j'ai été crée. Pourquoi pas, heureusement qu'on n'a pas fait pareil avec les toilettes... Mais je n'avais plus à les jalouser, j'étais enfin devenu une œuvre d'art à mon tour, l'un des plus beaux lave-linge qui soit !
Je ne me rappelle plus trop de la suite de l'histoire, ma mémoire me fait défaut depuis que je suis exposé. Ce que je sais, c'est que j'étais installé dans ce pays à peine plus grand qu'un slip d'obèse nommé Luxembourg et son musée exposait de l'art moderne. J'ai souvent été la proie des photographes curieux de voir un appareil ménager ici, mais certains ne savent même pas se servir de mon espèce, si cela peut les éduquer...
Il paraît qu'on a même
retranscrit mon histoire, mais qui serait assez fou pour mettre un
lave-linge comme héros d'une histoire sérieusement ? Sur ce, je
vous laisse, j'ai des admirateurs à satisfaire !
P.S : Non mon petit, tu ne peux pas me rentrer dedans. Que ce soit en tant que pièce de musée ou appareil actif. Si tu veux un lavage de cerveau, regarde NRJ12.
P.S : Non mon petit, tu ne peux pas me rentrer dedans. Que ce soit en tant que pièce de musée ou appareil actif. Si tu veux un lavage de cerveau, regarde NRJ12.